Après la mort… ?

« Si l’homme une fois mort pouvait revivre… »

Pour les hommes la mort est un ennemi, un sujet de crainte et de souffrance. Ils ont toujours essayé d’éviter cette réalité pénible en se réconfortant de l’idée que l’homme a une âme immortelle capable de survivre à la mort.

Les religions païennes de l’antiquité témoignent de la ténacité de ces croyances : en mettant le mort dans son sarcophage, les Égyptiens y mettaient quelquefois aussi non seulement ses armes (dont il était censé avoir besoin au cours de son voyage d’outre-tombe) mais aussi sa femme et ses serviteurs ; les religions nordiques enseignaient qu’il y avait pour les guerriers vaillants, tombés dans la lutte, un Walhalla où tout n’était que gloire et fête ; les musulmans croyaient que tuer des infidèles, c’était le moyen infaillible d’atteindre le paradis, où l’on pourrait prendre autant de femmes que l’on voudrait. Et c’est une croyance presque universelle parmi les « chrétiens » qu’après la mort on va au ciel.

Deux observations semblent bien s’imposer : d’abord, la croyance à l’immortalité de l’âme, d’une façon ou d’une autre, a été très répandue parmi les hommes, ce qui s’explique assez facilement du fait qu’elle répond évidemment à un impérieux désir du cœur humain ; ensuite, cette croyance n’a rien qui soit nécessairement et uniquement chrétien, puisqu’elle s’est répandue dans toutes les religions et parmi tous les peuples.

Mais qu’est-ce qui arrive donc après la mort ? Où allons-nous chercher une réponse véridique à cette question angoissante ? Dans les philosophies humaines ? Mais à quoi bon interroger l’homme sur sa propre destinée ? Comment peut-il en savoir la vérité ? Et d’ailleurs les philosophes se contredisent ! N’est-il pas évident que, s’il existe une réponse définitive à cette question, cette réponse doit provenir d’une source surhumaine, et qu’autrement elle n’aurait aucune valeur ? Mais cette source, où allons-nous la trouver ?

La Bible seule est capable de répondre à ce besoin fondamental : livre extraordinaire, voire unique dans la littérature du monde, puisqu’il prétend expliquer d’une façon définitive tant de problèmes d’une importance capitale pour tous les hommes : l’origine du monde et de la race humaine, la souffrance et la mort, et le plan divin pour notre salut. Les auteurs bibliques ne se sont jamais arrogé la gloire d’avoir pu écrire selon leurs propres connaissances, car ils se sont tous appelés les serviteurs du Dieu qui parlait par eux. Voici donc cette source surhumaine dont nous avons besoin. Si la Bible a quelque chose à nous dire sur la destinée de l’homme après la mort, il importe bien de le connaître.

Mais tout d’abord il y a une erreur bien grave à éviter : celle d’essayer de comprendre la Bible en prêtant à ses termes un sens qui n’est pas du tout biblique. Par exemple, pour la plupart des gens le mot âme signifie quelque chose d’immortel dans la personnalité humaine qui survit à la mort, de sorte qu’au moment de la mort l’homme ne meurt pas vraiment, mais continue à vivre dans un « monde meilleur au-delà des cieux ». Il est indispensable cependant de comprendre le vrai sens des mots hébraïques et grecs qu’on a traduits par le mot âme dans la Bible française. Agir autrement, ce serait se laisser inévitablement induire en erreur. Heureusement pour nous, préciser le vrai sens de ces mots si importants n’est pas une tâche très difficile. En somme, ce qu’il faut faire, c’est permettre à la Bible de s’expliquer elle-même, sans essayer d’imposer aucun sens de notre choix.


L’origine de la nature humaine

Puisque c’est la nature exacte de l’homme que nous voulons préciser, il paraît bien logique de nous reporter tout de suite au passage de la Genèse où il est question de la création :

« L’Éternel Dieu forma l’homme de la poussière de la terre, il souffla dans ses narines un souffle de vie et l’homme devint une âme vivante » (Genèse 2.7).

Voici une origine bien humble : l’homme fut fait de poussière pour qu’il sache clairement qu’il appartenait par sa nature à la terre. Mais quel était ce souffle de vie que Dieu a soufflé dans ses narines ? et qu’est-ce qu’une « âme vivante » ? Or, l’hébreu nephesh, traduit dans ce verset par le mot « âme », porte le sens élémentaire de souffle, respiration, et s’applique à un être, animal ou homme, qui vit par le souffle, par la respiration. C’est ainsi que ce terme se trouve plusieurs fois dans le premier chapitre de la Genèse traduit par le mot « animaux » :

« Dieu dit : Que les eaux produisent en abondance des animaux (nephesh) vivants… Dieu dit : Que la terre produise des animaux (nephesh) vivants selon leur espèce… Et à tout animal de la terre, à tout oiseau du ciel, et à tout ce qui se meut sur la terre, ayant en soi un souffle de vie (nephesh chaiyah = ‘âme vivante’) je donne toute herbe verte pour nourriture… » (Genèse 1.20, 21, 24, 30).

De l’étude de ce passage il ressort évidemment que l’homme tout autant que les animaux est une « âme vivante », une créature vivant de sa respiration, ayant comme eux un « souffle de vie ». Et puisque Dieu donna aussi ce souffle de vie aux animaux, il s’ensuit que cela ne signifie d’aucune façon leur donner l’immortalité, mais tout simplement leur donner cette vie physique et naturelle dont jouissent également hommes et bêtes.

Les hommes et les bêtes se ressemblent

Plusieurs passages bibliques soulignent cet enseignement d’importance capitale, que l’homme ressemble par sa nature aux bêtes. Dans l’époque qui précéda le Déluge

« la méchanceté des hommes était grande sur la terre, et toutes les pensées de leur cœur se portaient chaque jour uniquement vers le mal… La terre était corrompue devant Dieu, la terre était pleine de violence… car toute chair avait corrompu sa voie sur la terre » (Genèse 6.5, 11 12) ;

à tel point qu’il ne restait pas d’autre remède que celui de détruire presque toute la race humaine. D’où les paroles de Dieu à Noé :

« Je vais faire venir le déluge d’eaux sur la terre pour détruire toute chair ayant souffle de vie sous le ciel ; tout ce qui est sur la terre périra » (Genèse 6.17).

« J’exterminerai de la face de la terre tous les êtres que j’ai faits » [/i] (Genèse 7.4).

Ainsi,

« Tout ce qui se mouvait sur la terre périt, tant les oiseaux que le bétail et les animaux, tout ce qui rampait sur la terre, et tous les hommes. Tout ce qui avait respiration, souffle de vie dans ses narines… mourut. Tous les êtres qui étaient sur la face de la terre furent exterminés, depuis l’homme jusqu’au bétail, aux reptiles et aux oiseaux du ciel : ils furent exterminés de la terre » (Genèse 7.21 23).

Le sens de ce langage catégorique n’est pas douteux : c’est que les hommes et les animaux ont un sort identique : ils périssent, ayant une même nature. L’idée que les hommes survivent de quelque façon en vertu de leur « âme immortelle » ne se trouve nulle part dans ce récit.

L’Ecclésiaste a un passage également catégorique :

« J’ai dit en mon cœur, au sujet des fils de l’homme, que Dieu les éprouverait, et qu’eux-mêmes verraient qu’ils ne sont que des bêtes. Car le sort des fils de l’homme et celui de la bête est pour eux un même sort ; comme meurt l’un, ainsi meurt l’autre, ils ont tous un même souffle, et la supériorité de l’homme sur la bête est nulle ; car tout est vanité. Tout va dans un même lieu ; tout a été fait de poussière, et tout retourne à la poussière… » (Ecclésiaste 3.18 20).

Impossible de parler plus clairement ; aucune idée ici de survivance à la mort. Pareillement, le psalmiste raconte au Psaume 104 combien la création animale et humaine dépend de la bonté de Dieu pour sa vie même :

« …tous les animaux des forêts sont en mouvement ; les lionceaux rugissent après la proie, et demandent à Dieu leur nourriture… L’homme sort pour se rendre à son ouvrage… Tous ces animaux espèrent en toi… Tu leur retires le souffle : ils expirent, et retournent dans leur poussière… ».

Et le psalmiste, comprenant que ce sort attendait l’homme autant que les animaux, de s’écrier :

« Je chanterai l’Éternel tant que je vivrai, je célébrerai mon Dieu tant que j’existerai » (Psaume 104.20 21, 23, 27, 29, 33).

De même le Psaume 49 :

« L’insensé et le stupide périssent également… Ils s’imaginent que leurs maisons seront éternelles… mais l’homme qui est en honneur n’a point de durée. Il est semblable aux bêtes que l’on égorge » (Psaume 49.11 13).

Au dernier verset de ce même psaume se trouve une petite parenthèse très significative :

« L’homme qui est en honneur et qui n’a pas d’intelligence, est semblable aux bêtes que l’on égorge » (verset 21).

Pour être supérieur alors aux bêtes, ce qu’il faut à l’homme c’est « l’intelligence » ; ce qui ne veut pas dire simplement avoir la capacité de la raison, mais avoir la compréhension des choses spirituelles. Voici donc l’explication de Genèse 1.26 :

« Dieu dit : Faisons l’homme à notre image ».

L’homme ne fut pas dès son origine doué d’une « âme immortelle », mais plutôt de la capacité de comprendre les valeurs morales, ce dont les bêtes sont incapables.

Il faut donc conclure que la nature physique de l’homme et celle de la bête sont identiques ; qu’ils vivent tous les deux par la respiration et qu’après la mort « ils retournent à leur poussière » ; mais que l’homme peut atteindre à une « intelligence » qui pourra le rendre supérieur aux animaux.

Les morts sans connaissance

La Bible est logique avant tout. Puisque l’homme cesse totalement de vivre au moment de sa mort, il ne peut plus penser, ni sentir, ni réagir d’aucune façon ; il est sans connaissance. C’est ce que nous dit l’Ecclésiaste :

« Aussi le cœur des fils de l’homme est-il plein de méchanceté, et la folie est dans leur cœur pendant leur vie ; après quoi ils vont chez les morts. Car qui est excepté ? Pour tous ceux qui vivent il y a de l’espérance : et même un chien vivant vaut mieux qu’un lion mort. Les vivants, en effet, savent qu’ils mourront, mais les morts ne savent rien, et il n’y a pour eux plus de salaire, puisque leur mémoire est oubliée. Et leur amour, et leur haine, et leur envie ont déjà péri : et ils n’auront plus jamais aucune part à tout ce qui se fait sous le soleil » (Ecclésiaste 9.3 6).

Si une âme immortelle continuait d’exister après la mort, ne devrait-on pas croire que ce serait la partie la plus vitale de l’homme ? Comment donc affirmer que la personne morte n’a plus d’amour ni de haine ? Ne croit-on point communément que le mort est plus apte à servir Dieu après son décès qu’il ne l’était avant ? Comment donc le psalmiste a-t-il pu écrire :

« Reviens, Éternel ! délivre mon âme (= ma vie) ; sauve-moi à cause de ta miséricorde. Car celui qui meurt n’a plus ton souvenir ; qui te louera dans le séjour des morts ? (c’est-à-dire dans la tombe) » (Psaume 6.5).

Le roi Ézéchias, qui était sur le point de mourir, reçut de Dieu cette parole par le prophète Ésaïe :

« Tu vas mourir et tu ne vivras plus. »

Ézéchias se montre-t-il joyeux dans l’attente d’aller au ciel pour y servir mieux son Dieu ? Tout au contraire :

« Je ne verrai plus l’Éternel, L’Éternel, sur la terre des vivants ; je ne verrai plus aucun homme parmi les habitants du monde !… Je sens le fil de mes jours coupé comme par un tisserand » (Ésaïe 38.1, 11 12).

Après que Dieu lui eut accordé un prolongement de vie, Ézéchias s’exclama :

« Tu as pris plaisir à retirer mon âme (= ma vie) de la fosse de la destruction (= la tombe)… Ce n’est pas le séjour des morts qui te loue ; ce n’est pas la mort qui te célèbre ; ceux qui sont descendus dans la fosse n’espèrent plus en ta fidélité. Le vivant, le vivant, c’est celui-là qui te loue, comme moi aujourd’hui » (Ésaïe 38.17 19).

Le témoignage de ces passages n’admet point de doute : les morts ne sont plus en état de savoir quoi que ce soit. Il est donc tout à fait naturel de dire que les morts « dorment », selon l’expression biblique. Dans le chapitre 12 de Daniel se trouve un des passages les plus catégoriques de toute la Bible. Le prophète prédit pour la fin des temps

« une époque de détresse, telle qu’il n’y en a point eu de semblable depuis que les nations existent jusqu’à cette époque ».

Et le prophète ajoute, en parlant toujours de la même époque :

« Plusieurs de ceux qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront. les uns pour la vie éternelle, et les autres pour l’opprobre, pour la honte éternelle » (Daniel 12.1 2).

Comme il est clair, ce passage ! Les morts demeurent dans la poussière de la terre ; puisqu’ils sont sans connaissance, ils dorment jusqu’à un moment donné. C’est une expression figurée qu’on relève souvent dans le Nouveau Testament.

« Lazare, notre ami, dort »,

dit Jésus à ses disciples.

« Jésus avait parlé de sa mort »,

ajoute l’évangéliste (Jean 11.11, 13). Étienne, martyrisé par les Juifs, « s’endormit » (Actes 7.60). Paul écrit aux Thessaloniciens :

[i] « Nous ne voulons pas, frères, que vous soyez dans l’ignorance au sujet de ceux qui sont décédés » (Note de la version Segond : « ceux qui dorment ou ceux qui sont morts ») (1 Thessaloniciens 4.13).

Dans d’autres passages semblables la version Segond ne traduit pas toujours de façon exacte l’original grec, mettant « sont morts ». Nous citerons donc ici la version de l’abbé Crampon, qui a traduit plus fidèlement le mot grec, car il s’agit toujours de l’idée de s’endormir.

« Car si nous croyons que Jésus est mort et qu’il est ressuscité, croyons aussi que Dieu ramènera par Jésus ceux qui se sont endormis en lui » (c’est-à-dire, il ressuscitera de la tombe ses fidèles serviteurs endormis) (1 Thessaloniciens 4.14).

« Nous les vivants, restés pour l’avènement du Seigneur, nous ne devancerons pas ceux qui se sont endormis » (c’est-à-dire, les vivants ne recevront pas leur récompense avant les morts. L’apôtre ne croyait évidemment pas que les morts eussent déjà reçu leur récompense au ciel !) (1 Thessaloniciens 4.15).

« Jésus est apparu à plus de cinq cents frères à la fois, dont la plupart sont encore vivants et dont quelques-uns se sont endormis » (1 Corinthiens 15.6).

« Si Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine, vous êtes encore dans vos péchés, et par conséquent aussi ceux qui se sont endormis en Christ sont perdus » (verset 18).

(Quel passage bouleversant ! Si Christ n’est pas ressuscité, même ceux qui ont cru en lui sont perdus !)

« Mais Christ est ressuscité, il est les prémices de ceux qui se sont endormis » (verset 20).

Ce témoignage impressionnant ne laisse plus de doute. Les morts, étant sans connaissance, dorment dans la poussière de la terre, oublieux de tout ce qui se fait sur la terre ou au ciel.

La résurrection des morts

S’il n’y avait pour le serviteur de Dieu aucune autre perspective que le sommeil éternel de la tombe, il y aurait vraiment de quoi se désespérer. Mais le passage déjà cité de Daniel (12.1) laisse percevoir de la façon la plus claire la possibilité d’une vie nouvelle :

« Plusieurs de ceux qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront, les uns pour la vie éternelle et les autres pour l’opprobre, pour la honte éternelle » (Daniel 12.1).

C’est l’enseignement, bien connu de l’étudiant du Nouveau Testament, de la résurrection des morts, et du jugement. Ce n’était pas d’ailleurs un enseignement étranger aux fidèles des anciens temps. Abraham, sommé d’offrir son fils, s’apprêta à obéir.

« Il pensait que Dieu est puissant, même pour ressusciter les morts » (Hébreux 11.19).

Le psalmiste s’exclame :

« Ô Dieu, qui est semblable à toi ?… Tu nous redonneras la vie. Tu nous feras remonter des abîmes de la terre » (Psaume 71.19 20).

« Les abîmes de la terre » c’est un hébraïsme pour la tombe ; le psalmiste croyait donc à la résurrection des morts. Jésus s’est servi d’un langage bien semblable à celui de Daniel 12.1 :

« L’heure vient où tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront sa voix (celle du Fils de l’Homme — verset 25) et en sortiront. Ceux qui auront fait le bien ressusciteront pour la vie, mais ceux qui auront fait le mal ressusciteront pour le jugement » (Jean 5.28).

Il ne s’agira pas de faire descendre les justes du ciel, mais de les ressusciter là où ils se trouveront, dans les sépulcres, (« dans la poussière de la terre » (Daniel 12.1)), pour qu’ils reçoivent la grande récompense de la vie éternelle.

Tout lecteur attentif du Nouveau Testament sait que le dogme de la résurrection des morts joue un rôle important dans les épîtres de l’apôtre Paul :

« Le Seigneur lui-même, à un signal donné, à la voix d’un archange, et au son de la trompette de Dieu, descendra du ciel et les morts en Christ ressusciteront premièrement » (1 Thessaloniciens 4.16).

Dans sa première épître aux Corinthiens l’apôtre a consacré tout un chapitre, le célèbre chapitre 15, à combattre la thèse de certains qu’il n’y aurait pas de résurrection, et à insister sur le caractère littéral qu’aurait cet événement saisissant.

Une fois de plus nous pouvons apprécier la logique de la Bible : puisque l’homme ne vit que par la respiration, quand Dieu retire son souffle, il meurt et dort dans la tombe s’il doit reprendre la vie, ce ne sera, évidemment, qu’en se réveillant, en ressuscitant. Mais si « l’âme immortelle » jouit déjà de la félicité céleste, à quoi bon la résurrection du corps ? Une âme pure et spirituelle devra-t-elle descendre de sa « demeure glorieuse » pour s’unir avec les restes pourris d’un corps charnel ? Il suffit d’avancer une telle idée pour en apprécier le ridicule. Par contre, l’enseignement biblique est raisonnable et concorde admirablement avec l’expérience humaine. On sent toute la force du jugement divin :

« Mais tu ne mangeras pas de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, car le jour où tu en mangeras, tu mourras certainement » (Genèse 1.17),
« C’est à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain, jusqu’à ce que tu retournes dans la terre, d’où tu as été pris ; car tu es poussière et tu retourneras dans la poussière » [/i] (Genèse 3.19).

On comprend aussi pourquoi, après la transgression d’Adam et d’Ève, les anges ont empêché les coupables « d’avancer la main, de prendre de l’arbre de vie, d’en manger et de vivre éternellement » (Genèse 3.22). Si nous croyons que cette mort prononcée sur Adam et sur Ève ne l’était qu’en apparence, en vertu de leur « âme immortelle », n’inculpons-nous pas Dieu de fraude et de mensonge ? Conclusion inconcevable ! Puisque l’homme n’est qu’un souffle, faible de corps et d’esprit, on apprécie l’urgence de l’exhortation divine, souvent répétée, à choisir le bien et à rejeter le mal. Moïse dit aux Israélites :

« J’ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie… » (Deutéronome 30.19).

Jésus dit :

« Allez par tout le monde, et prêchez la bonne nouvelle à toute la création. Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé : mais celui qui ne croira pas sera condamné » (Marc 16.15 16).

C’est le choix angoissant qui se pose à tout homme qui connaît la Parole de Dieu ; c’est la conviction de sa déchéance et de sa nature corruptible, et en même temps une sommation d’obéir à son Créateur pour pouvoir hériter enfin d’une vie éternelle.

« Oui, mais… »

Le lecteur attentif, tout en reconnaissant la force du témoignage biblique déjà cité, pourrait bien se demander s’il n’existe pas des passages dans la Bible qui semblent soutenir la thèse de l’immortalité de l’âme. Il faut dire tout de suite qu’il y a un nombre très restreint de passages ayant cette apparence, et nous allons maintenant examiner deux des mieux connus, deux cas dont se servent le plus souvent ceux qui veulent avancer les preuves de leur thèse. Avant de les examiner en détail, nous ferons bien de nous rappeler l’enseignement de la Bible déjà parcouru sur la mortalité fondamentale et complète de l’homme, enseignement que nous ne pourrons pas évidemment mettre de côté sans des raisons très importantes. Nous devons nous garder aussi de jamais lire des textes sans étudier leur contexte ; et veiller à ne lire les termes bibliques que dans le sens biblique. Ce ne sont là que des précautions raisonnables qui nous aideront à éviter des erreurs. Le lecteur sera peut-être un peu surpris de découvrir que, une fois soumis à un tel examen, les textes choisis par les adhérents de la théorie de l’âme immortelle n’appuient pas du tout cette thèse.

Le cas du Larron crucifié à côté de Jésus est probablement le plus célèbre. On connaît les détails, selon Luc 23.39 43. Sentant la mort proche, le larron se tourna vers Jésus pour lui dire :

« Souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton règne. Jésus lui répondit : Je te le dis en vérité, aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis ».

Pour ceux qui veulent croire à l’âme immortelle, toute la valeur de ce passage dépend du temps de l’accomplissement de la promesse faite par Jésus au malfaiteur. Mais on n’a qu’à réfléchir un instant pour s’apercevoir que les difficultés ne manquent pas. D’abord, ce passage semble soutenir une idée qui est tout à fait contraire à l’enseignement général de la Bible d’après les nombreux passages déjà cités. Ensuite, où était Jésus après sa mort ce jour-là ? Au ciel ? Permettons que la Bible nous le dise :

« Car, de même que Jonas fut trois jours et trois nuits dans le ventre d’un grand poisson, de même le Fils de l’homme sera trois jours et trois nuits dans le sein de la terre » (Matthieu 12.40),

idiotisme hébraïque qui signifie « dans la tombe ». On objecte d’habitude que cette affirmation ne s’appliquait qu’au corps de Jésus, et que son âme était ailleurs. Mais il faut absolument reconnaître, d’abord, que ce mot « âme », selon les passages déjà cités, ne signifie que « la vie » et ne comporte nullement l’idée d’immortalité ; ensuite, que « l’âme », ou la vie, ou la personne, de Jésus était justement dans la tombe pendant ces trois jours, et non pas ailleurs : Actes 2.27 :

« Car tu n’abandonneras pas mon âme dans le séjour des morts et tu ne permettras pas que ton Saint voie la corruption ».

Pierre, qui cite ici un psaume prophétique, explique (verset 31) que David parlait dans ce psaume de la résurrection du Christ,

« en disant qu’il ne serait pas abandonna dans le séjour des morts »,

ou, plus correctement selon le texte grec, que « son âme ne serait pas abandonnée… ». On ne peut plus douter que, après sa mort, l’âme de Jésus était dans la tombe, d’où elle a été sauvée au moment de sa résurrection.

Le mot « paradis » a aussi pour les lecteurs modernes un sens bien différent de son usage biblique. Ce sens moderne, comportant l’idée d’une demeure où les morts jouissent d’une félicité éternelle, est en fait un sens très ancien, puisqu’il eut son origine dans les religions païennes de l’antiquité.

Ainsi dans l’Ancien Testament le mot paradis est d’origine persane, mais signifie tout simplement en hébreu « verger » ou « jardin » :

« Je me fis des jardins et des vergers (pardès) » (Ecclésiaste 2.5) ;
« Tes jets forment un jardin (pardès) » (Cantique 4.13).

Quelquefois les prophètes se servent de cette même idée d’un jardin pour parler de l’avenir ; par exemple, chez Ézéchiel nous lisons :

« Et l’on dira : cette terre dévastée est devenue comme un jardin d’Éden » (Ézéchiel 36.35) ;

et dans la prophétie d’Ésaïe (51.3) :

[i] « Ainsi l’Éternel a pitié de Sion. Il a pitié de toutes ses ruines ; il rendra son désert semblable à un Éden, et sa terre aride à un jardin de l’Éternel ».

Il est question ici de l’époque de l’établissement du royaume de Dieu, époque où la Palestine ressemblera dans sa fertilité à un jardin, un paradis.
Cela compris, la réponse de Jésus au larron devient plus claire. Le larron dit :

« Souviens-toi de moi, quand tu viendras dans ton règne » (Luc 23.42).

Il est à noter que le larron ne s’attendait pas à partir de la terre pour rejoindre Jésus quelque part ailleurs ; il s’attendait à ce que Jésus vienne régner ; autrement dit, il connaissait l’enseignement des prophètes sur l’établissement du royaume de Dieu sur la terre. Jésus l’assura que son désir serait accompli :

« Tu seras avec moi dans le paradis ».

ce qui équivalait à dire : « dans mon règne, mon royaume ».
Mais ce mot « aujourd’hui » ? Ici il faut se rendre compte du fait que la ponctuation dans les versions et les manuscrits bibliques est un phénomène assez moderne ; il n’y en avait pas avant le IXe siècle de notre ère. Le manuscrit grec porte les mots écrits de cette façon :

« JETELEDISENVERITEAUJOURDHUITUSERASAVECMOIDANSLEPARADIS ».

Le lecteur français aurait de la peine à décider s’il devrait lire : « Je te le dis en vérité, aujourd’hui tu seras… » ou « Je te le dis en vérité aujourd’hui, tu seras… ». Mais il est évident que placer la virgule avant ou après le mot « aujourd’hui », c’est changer tout à fait le sens du passage. Or, dans le texte grec, le cas est même plus favorable à la deuxième de ces versions (« Je te le dis en vérité aujourd’hui, tu seras… ») qu’il ne l’est en français. Il ne manque pas dans le Nouveau Testament d’expressions analogues où le traducteur n’a pas hésité à joindre l’adverbe aujourd’hui au verbe précédent et non pas au verbe suivant ; par exemple, Actes 26.29 :

« …plaise à Dieu que non seulement toi, mais encore tous ceux qui m’écoutent aujourd’hui, vous deveniez tels que je suis… ».

Le style de cette expression ressemble tout à fait à celui du passage que nous sommes en train d’examiner.

Enfin, il n’est pas sans importance de constater que Jésus se servait dans ces paroles d’une expression hébraïque, Je te le dis aujourd’hui, dont plus de quarante exemples se rencontrent dans le seul livre de Deutéronome. C’était une affirmation solennelle.

A tout prendre, le sens du passage est assez clair. Le larron pria Jésus de lui accorder une entrée dans le royaume qu’il établirait sur la terre. Jésus lui affirma de façon solennelle que son vœu serait réalisé. Pris ainsi le passage concorde admirablement avec l’enseignement de la Bible, et les difficultés disparaissent.

Nous examinerons maintenant la parabole du Mauvais Riche et du pauvre Lazare, dont le lecteur trouvera le récit dans Luc 16.19 31. D’abord, avons-nous affaire à une parabole ou à une histoire véritable ? Au premier verset du même chapitre nous lisons :

« Jésus dit aussi à ses disciples : un homme riche avait un économe… »,

et de toute évidence ce qui suit est une parabole. Et au verset 19 c’est toujours Jésus qui parle à ses disciples :

« Il y avait un homme riche… ».

Certains détails de ce récit, pris au pied de la lettre, auraient l’air tout à fait invraisemblables. Peut-on vraiment croire que les justes et les injustes aillent après leur mort à deux endroits différents, situés en même temps si proches l’un de l’autre qu’ils puissent s’entretenir ? Et que les justes contemplent sans s’émouvoir le spectacle des injustes en proie aux tourments de la flamme cruelle ? Et qu’un fidèle comme Lazare soit dans le sein d’Abraham ? On n’a qu’à dresser la liste de telles discordances pour comprendre qu’on a ici affaire à une parabole.

En plus, c’est une parabole dont Jésus n’a pas inventé les détails. Les Juifs, rentrés en Palestine au VIe et au Ve siècles avant Jésus-Christ après leur exil de Babylone, rapportèrent avec eux de nouvelles croyances, puisées non pas dans leurs Saintes Écritures mais dans la religion païenne de leurs vainqueurs babyloniens. Flave Josèphe écrivit au premier siècle de notre ère une histoire israélite ou se trouve entre autres un exposé assez détaillé des croyances juives contemporaines. Selon celles-ci, les âmes des justes et des injustes étaient détenues dans Hadès, mot grec qui signifie les Enfers, où elles étaient placées à la charge des anges ; les justes étaient portés dans le sein d’Abraham, les injustes dans un lieu de tourments, ce qui n’empêchait pas qu’ils puissent se parler les uns avec les autres. On n’a qu’à considérer de telles idées pour s’apercevoir de l’étonnante ressemblance qui existe entre elles et les détails de la parabole prononcée par Jésus. Il devient donc clair que Jésus, en racontant cette parabole, se servait des idées des Pharisiens eux-mêmes.

Faut-il en conclure que ces idées soient forcément vraies ? Évidemment non ; car Jésus prononçait des paraboles non pas pour enseigner comme vérités les détails dont elles étaient composées, mais pour faire ressortir chaque fois une leçon fondamentale. Il en est ainsi dans ce passage, qui, au dernier verset, lançait aux Juifs l’avertissement le plus solennel :

« S’ils n’écoutent pas Moïse et les prophètes, ils ne se laisseront pas persuader même si quelqu’un des morts ressuscitait » (Luc 16.31).

Jésus, qui condamnait souvent les traditions des Pharisiens, se servait dans cette parabole de leurs propres croyances pour les confondre. Qu’on ne s’étonne pas de cette méthode. Après avoir prononcé la parabole du semeur, Jésus dit à ses disciples (Luc 8.10) :

« Il vous a été donné de connaître les mystères du royaume de Dieu ; mais pour les autres, cela leur est dit en paraboles, afin qu’en voyant ils ne voient pas et qu’en entendant ils ne comprennent point ».

A ceux qui tenaient absolument à défendre leurs fausses idées, il était permis de rester en erreur ; c’était le cas des Pharisiens. Les sincères chercheraient à comprendre les paroles de Jésus ; à eux, il leur serait donné de connaître les mystères du royaume de Dieu.

Il faut donc avouer que ce passage non plus, une fois examiné et compris, ne soutient pas la thèse de l’immortalité de l’âme. Il en est de même des autres versets cités de temps en temps par les défenseurs de cette thèse ; un examen attentif révèle toujours qu’il n’en est rien ; c’est un dogme que la Bible n’enseigne point.


Résumé

De l’étude précédente il s’ensuit qu’une doctrine très répandue, voire considérée comme fondamentale dans la chrétienté, à savoir que l’homme possède une âme immortelle, est une doctrine tout à fait fausse ; et il faut dire aussi que les conséquences qui en découlent sont très graves.

D’abord, se croyant déjà doués en quelque façon de l’immortalité, les hommes ont tendance à se considérer comme très précieux aux yeux de Dieu, en vertu du seul fait qu’ils sont des hommes. Grosse erreur, et qui est à l’encontre de tout l’enseignement de la Bible. Selon la Parole de Dieu, l’homme, fait de poussière, y retourne après la mort à cause de sa nature pécheresse et mortelle. Ce n’est qu’après avoir vraiment compris ce dogme fondamental et s’être rendu compte en même temps de sa petitesse, de son peu de valeur, que l’homme est en état de s’approcher de son Dieu.

Il s’ensuit aussi que le Purgatoire est un mythe puisé dans la religion païenne de l’antiquité, et que le culte des « saints » c’est de la peine perdue, pour n’en pas dire pis, puisque, n’étant que des hommes, ils « dorment dans la poussière de la terre » (Daniel 12.2) comme le reste de l’humanité mortelle.

Ensuite, l’immortalité se révèle comme le « don gratuit » de Dieu, mais un don accordé sous conditions ; d’où l’importance capitale de savoir quelles sont ces conditions, et de connaître l’enseignement de la Bible, qui seule peut nous en instruire.

« Je serai sanctifié par ceux qui s’approchent de moi »,

dit Dieu à Israël (Lévitique 10.3) ; comment l’homme pécheur et mortel peut-il s’arroger le droit de poser ses propres conditions pour s’approcher de son Créateur ?

Enfin nous sommes en état maintenant de bien comprendre le caractère indispensable du sacrifice de Jésus-Christ. La mort du Fils de Dieu n’était pas un vain geste ; il ne se soumit pas à la grande épreuve de la croix pour « sauver » des hommes déjà doués d’une âme immortelle et qui n’avaient donc aucun besoin de son sacrifice ! Voilà à quelle absurdité la croyance populaire nous entraîne. La vérité, c’est que les hommes ont vraiment besoin du salut, qui leur est offert uniquement par la foi en Jésus-Christ.

« Il n’y a de salut en aucun autre ; car il n’y a sous le ciel aucun autre nom qui ait été donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés » (Actes 4.12).

C’est le cœur même de l’évangile, cette « puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit » (Romains 1.16). Mais comment comprendre l’œuvre du Christ sans comprendre la nécessité absolue du salut pour les membres d’une race humaine déchue et mortelle ?

Que cette fausse croyance soit répandue dans le monde soi-disant chrétien, de sorte que beaucoup de gens sont en erreur, il n’y a pas là de quoi s’étonner. Les hommes n’ont jamais respecté longtemps les vérités divines ; ils les ont toujours changées et corrompues. Rappelons-nous l’avertissement solennel lancé par l’apôtre Paul :

« Car il viendra un temps où les hommes ne supporteront pas la saine doctrine ; mais… détourneront l’oreille de la vérité et se tourneront vers les fables » (2 Timothée 4.3 4).

Les philosophies humaines, laïques ou confessionnelles, n’ont aucune valeur en elles. Remettons-nous uniquement à la Parole de Dieu, qui seule est capable de nous instruire et nous éclairer sur nos faiblesses naturelles, et en même temps de nous faire savoir les conditions indispensables du salut en Jésus-Christ.

(Sauf mention contraire, toutes les citations sont tirées de la Traduction Louis Segond, Version revue 1975.)


Voici une sélection parmi les nombreux passages où il est dit que l’âme humaine est susceptible de mourir :

Deutéronome 19.6
« …il s’enfuira… de peur que le vengeur de sang ne (le) frappe mortellement… » (héb. : « ne tue l’âme de… ») ;

Deutéronome 19.11
« …après l’avoir frappé… de manière à causer sa mort… » (héb. : « à tuer son âme ») ;

Juges 16.30
« Que je meure avec les Philistins ! » (héb. : « Que mon âme meure… ») ;

Job 36.14
« Ils perdent la vie… » (héb. : « Leur âme meurt… ») ;

Psaume 49.19
« Tu iras au séjour de tes pères » (héb. : « L’âme ira… ») ;

Psaume 78.50
« Il ne sauva pas leur âme de la mort » ;

Ézéchiel 18.4
« L’âme qui pèche, c’est celle qui mourra ».

« L’hébreu nephesh, âme, se rencontre 754 fois dans l’Ancien Testament ; dans 326 de ces passages il est affirmé que l’âme est passible de la mort ; dans 203 autres, qu’elle est en danger de mort ; dans 123 elle est sauvée de la mort, ce qui montre qu’elle en est passible. Le grec psukhê se rencontre 106 fois dans le Nouveau Testament ; 45 fois la psukhê (l’âme) est passible de la mort ; 29 fois en danger de mort ; 16 fois est sauvée de la mort. » (Waller : Concordance on the Soul)


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